Entre difficultés et prouesses.
Un ouvrage complexe conçu en trois dimensions
Du fait de sa géométrie complexe et des interfaces nombreuses entre le génie civil et les équipements électromécaniques, le pont Jacques Chaban-Delmas a fait l’objet d’une modélisation numérique complète en 3D, dès la phase de conception. Ce travail a permis de donner une vision volumétrique de l’ouvrage final jusque dans ses moindres détails. Il a notamment permis de détecter avec précision les points de conflits mécaniques et d’y apporter les solutions adéquates.
Une construction impressionnante
Afin d’éviter les complications liées à la fabrication dans le lit de la Garonne, soumise à de fortes marées, les structures en béton (îlots de protection, embases, pylônes, piles intermédiaires…) ont été préfabriquées à 6 km du site, permettant un gain de temps et la réalisation des deux estacades principales (2 x 300 m). Les éléments préfabriqués ont été ensuite remorqués et fondés selon des modes différents, tenant compte du contexte géologique hétérogène.
Quant aux travées, chacune a parcouru 5 500 km sur une barge ; un voyage maritime de 3 semaines depuis les usines Cimolai (proches de Venise) jusqu’au port de la Lune. Plusieurs heures ont été nécessaires pour les positionner sur leurs bases, au rythme de la marée et avec une tolérance de positionnement de quelques centimètres seulement. Avec 117 m de longueur et 45 m de largeur pour un poids de 2 500 tonnes, la superficie de la travée centrale levante est égale celle d’un terrain de football !
Le levage d’un géant
La travée levante est mue par un dispositif de levage simple et éprouvé, qui s’apparente à celle d’un gigantesque ascenseur. Chaque extrémité de la travée mobile est suspendue au droit de chacun des pylônes par dix câbles qui viennent s’enrouler autour d’une poulie de 4 mètres de diamètre logée en tête des pylônes. Ces câbles porteurs sont rattachés au-dessus de chacun des contrepoids présent dans les quatre pylônes. Ces derniers se déplacent à l’intérieur des pylônes grâce à des câbles de manœuvre fixés par le dessous, et s’enroulant autour de treuils motorisés, fixés en fond de chaque embase. La machinerie n’a alors qu’à fournir une force de levage d’environ 100 tonnes, qui correspond au différentiel de poids entre la travée mobile et les contrepoids. Cette faible prépondérance autorise une motorisation réduite et économe.
Les dimensions exceptionnelles de la travée levante rendaient l’ouvrage très sensible aux actions du vent, notamment en position haute. Dès les premières esquisses, la forme de la travée levante a été profilée pour diminuer les effets aérodynamiques sur le pont. Des études approfondies ont ensuite été menées s’appuyant sur les données locales et sur l’exploitation des résultats des essais réalisés sur un modèle réduit (au 70e de sa taille) soumis à diverses conditions dans les installations du CSTB (Centre scientifique et technique du bâtiment) à Nantes.